Dans la cour paisible du Monastère de Samokov règnent le calme et le silence. Une fois le seuil franchi, le ton de la voix s’abaisse inconsciemment et l’âme se remplit de paix. L’été bat son plein et le soleil s’abat impitoyablement, dès le matin, sur les bâtiments de deux étages du couvent, regroupés autour de la vieille église de l' «Intercession de la Mère de Dieu ». La chaleur est si forte que même les oiseaux se sont cachés quelque part à l’ombre.
Nous sommes à la rencontre de sœur Pélaguia, la supérieure du couvent de Samokov. Elle est habituée à recevoir des hôtes dans ce lieu sacré. La plupart sont des croyants venant de l’ensemble du pays pour allumer une bougie et être seul avec Dieu pour quelques instants. Mais les touristes sont aussi nombreux à y venir. Ils se promènent dans la cour, regardent furtivement à travers les fenêtres des bâtiments et remplissent la vieille église d’un tumulte insouciant. Contrairement à la majorité de nos autres monastères, qui ont bâti ou aménagé des parties hôtels à des fins touristiques, au couvent de Samokov il n’y a pas d’extras et d’attractions prévues. « C’est un monastère et non pas un hôtel », tranche sœur Pélaguia. Mais elle nous fait visiter volontiers le cloître et nous raconte l’histoire de ce lieu enveloppé de mystère.
Le monastère est fondé en 1772 par des religieuses très éduquées et il devient vite un centre de spiritualité et d’instruction pour toute la région. Vers le milieu du 19e siècle dans les locaux monastiques vivaient déjà plus de 100 religieuses et filles novices. Beaucoup d’entre elles étaient des veuves ou des femmes aisées de Samokov, qui bâtissaient avec leurs propres moyens ces petites maisons modestes pour y passer le reste de leur vie dans le jeûne et la prière. C’est ainsi que s’est formé, peu à peu, tout un complexe dont la plupart des bâtiments ont survécu jusqu’à nos jours.
Aujourd’hui, dans le couvent habitent quatre religieuses seulement. L’une d’entre elle est sœur Hérouvima, âgée de 94 ans. C’est la religieuse la plus âgée de Bulgarie. Venue ici à l’âge de 5 ans, elle se souvient de tous les événements historiques du siècle dernier, malgré son âge avancé. Sinon, le quotidien des religieuses est monotone.
« Travail, prières, et encore du travail et des prières - dit la supérieure. - C’est ce qui remplit la vie d’un serviteur de Dieu. Nous travaillons dur, et nous travaillons également pour instruire les gens. Il y a aussi beaucoup de personnes en difficulté qui se tournent vers nous et cherchent notre aide ».
Nous entrons avec soeur Pélaguia dans l’église monastique de l'« Intercession de la Mère de Dieu ». Elle est édifiée en 1837-1839, près d’un demi siècle après la fondation du couvent. On reste émerveillé par les sculptures en bois dorées de l’iconostase et les fresques magnifiques. Les sculptures en bois sont de la célèbre école de Samokov, tout comme l’iconostase. Dans le porche du temple il y a une composition de Zaharii Zograf (1810 - 1853), le célèbre peintre et dessinateur d’icônes de Samokov. On peut voir aussi son auto-portrait. Soeur Pélaguia nous montre une icône plus particulière de la Vierge Marie qu’elle nous explique être miraculeuse, aux vertus de guérison.
Mais là où les croyants et les touristes restent le plus longtemps, c’est devant deux icônes, l’une grande et l’autre petite, où la Vierge Marie est représentée avec des ailes, ce qui est en contradiction totale avec les canons de l’Eglise orthodoxe, selon lesquels elle est au-dessus des anges et des archanges et ne peut pas être représentée avec des ailes.
Et soeur Pélaguia raconte la légende suivante:
“Quand les Turcs attaquent la ville de Samokov, devant eux apparaît l’image de la Vierge Marie qui jette son voile sur l’ensemble de la ville pour la préserver du malheur. Et comme ils sont très croyants et vénèrent aussi la Sainte, ils retournent immédiatement en arrière. Ceci explique pourquoi la Vierge Marie est représentée de cette façon dans notre église ».
Actuellement l’église est en rénovation. A partir de l’automne elle va accueillir une école du dimanche de catéchisme. Il y aura également des cours de peinture d’icônes où les élèves de la ville pourront apprendre les techniques de l’école de Samokov. On est en train d’aménager aussi des cellules pour des croyants, des personnes malades qui viennent chercher la guérison et des gens en besoin qui pourront y séjourner pour un certain temps.
Avant de partir, soeur Pélaguia nous bénit et nous souhaite de vivre dans la vertu et la paix avec notre âme.
Version française: Sia Karaguiozova
Photos:Vénéta Nikolova
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