Le plus petit des félins a tout pour inspirer l'univers culturel des peuples : longtemps l'Égypte ancienne l'a vénéré, Marcel Aymé l'a célébré dans ses Contes du chat perché, Charles Perrault et Walt Disney lui ont donné ses lettres de noblesse dans Le Chat botté et Les Aristochats. Noir il porte malheur, absent il invite les souris à la danse, toujours il retombe sur ses pattes... En effet, les dictons et proverbes dont le chat est le personnage principal sont pléthore, en Bulgarie comme en France. « Ceux qui jouent avec des chats doivent s’attendre à être griffés », « La nuit tous les chats sont gris », « Quand chat se frotte la tête, il y aura bientôt tempête » ou encore « Le ronronnement est le sourire du chat » Sans oublier le trait d’esprit du grand Chateaubriand qui faisait la remarque philosophique : J’aime dans le chat cette indifférence avec laquelle il passe des salons à ses gouttières natales.
Le chat est présent tant dans les traditions que dans le folklore des Bulgares. C’est un animal de compagnie qui a du caractère et qui ne se laisse pas facilement apprivoiser. Beaucoup de légendes, mais aussi des chants traditionnels lui sont consacrés.
Il fut un temps où nos anciens croyaient qu’à l’origine du monde, les chats avaient le don de la parole et s’exprimaient librement tout comme les humains. Jusqu’à ce que Dieu décide de leur ôter la maîtrise de la langue qu’il ne réserva qu’aux êtres humains. Ce qui n’empêcha pas les chats de communiquer entre eux dans la langue dont eux seuls avaient la connaissance. D’après l’illustre ethnographe bulgare Dimitar Marinov, dès que les chats et les hommes cessèrent de se comprendre, c’est une véritable guerre qui éclata entre eux. Et les chats s’attaquèrent sans hésiter aux hommes qu’ils croisaient sur leur chemin. Mais tous les chats n’étaient pas aussi cruels, une partie de la race se laissa domestiquer au point de devenir un animal de compagnie. Mais à la différence du chien, le chat n’est pas particulièrement apprécié et affectionné dans les foyers bulgares. A cause précisément de son caractère rebelle et de ses mouvements imprévisibles… « La seule utilité du chat est qu’il chasse les souris », écrit encore Dimitar Marinov qui visiblement préfère la fidélité et le dévouement à son maître du chien. Nos anciens disaient encore que si vous voyez un chat dans votre rêve, il faut s’attendre au pire. Si le chat vous griffe, vous allez vous disputer avec un proche.
Et pourtant, le chat finit par s’attacher à la maison où il habite. Et si son maître quitte le foyer, il ne le suit pas, à la différence du chien. Certaines chansons folkloriques parlent du coq qui reste perché sur le toit du poulailler, du chien qui monte la garde dans la cour, alors que le chat ronronne tranquillement au coin du feu… Si le maître de maison meurt, le chien pleure, alors que le chat, lui, ne cache pas sa joie…C’est ce comportement différent des deux animaux qui explique certainement l’animosité qu’ils éprouvent l’un pour l’autre…
Terminons par quelques autres dictons, fruits des longues observations de nos anciens de leur chat. S’il reste près du feu, le temps ne tardera pas à se gâter. S’il lèche son museau, c’est un visiteur qui bientôt s’annoncera à la porte. Bien sûr, nous n’oublions pas le chat noir qu’il faut à tout prix éviter sur son chemin et qui annonce les malheurs.
En Bulgarie, le chat noir est aussi associé à la ville de Gabrovo où chaque année, le 17 mai est organisé un carnaval, mené par la mascotte des Gabroviens, le grand chat noir à qui l’on coupe symboliquement la queue. L’explication est toute simple, surtout si l’on apparente les Gabroviens aux Auvergnats pour leur radinerie. Un cliché probablement, mais le fait est que c’est pour éviter les courants d’air ou que la porte se ferme trop lentement que l’on devait couper la queue du chat. Nous disons bien « devait », car personne ne mutilait son minet préféré.
Récit : Sonia Vasséva
Photos : BGNES et archives
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