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Les archives du photographe Todor Slavtchev racontent l’histoire contemporaine de la Bulgarie

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Todor Slavchev en 1985

Todor Slavchev est sans doute une sommité de la photographie et du reportage, ayant su documenter l’histoire sociale de la Bulgarie sur plusieurs décennies, tout en apportant son regard singulier. Véritable pionnier du genre, ses milliers des clichés nous révèlent tous les aspects de la vie sociale, politique, économique et culturelle de la Bulgarie depuis les années 1930 jusqu’en 1992.  Todor Slavtchev a documenté la vie partout : dans les villages à travers letravail et les portraits des paysans, l’industrialisation, la vie des ouvriers, des artisans, des hommes et des femmes de tout le pays. Slavtchev est aussi le photographe de l’élite : rois, intellectuels, politiques, grands sportifs, artistes. Parmi eux les écrivains Elin Pélin, Dimitar Dimov, Dmitar Talev, le roi Boris III, le peintre Vladimir Dimitrov- Maystora, l’écrivain américain Erskine Caldwell, l’architecte allemand Adolf Muesmann qui a conçu le plan urbain de la ville de Sofia des années 30. 

Le peintre Vladimir Dimitrov – Maystora

Quatre régimes politiques se sont succédés devant l’objectif de l’appareil photo du photographe né en 1900 à Plovdiv et mort en 1992 à Sofia. Si nous découvrons aujourd’hui ce trésor d’archives c’est grâce à sa petite fille Yana Ouzounova qui maintient le site et la page facebook sur Todor Slavtchev. http://photoarhiv-todorslavchev.com. Sans l’aide des institutions, elle fait un travail de titan pour le développement des, la digitalisation des photos et leur diffusion au public. Pour Yana, ces archives sont un véritable matériau de recherche sur le passé.

« Il y a des thèmes différents qui reflètent le parcours du photographe. Mais il y a aussi le regard particulier de mon grand-père qui aimait montrer les visages et les personnalités des gens. Il était attiré par leur visages, expressions, leurs états d’âme, il s’intéressait à leur travail et conditions de vie ».

Malheureusement, une partie des clichés de la période 1930-1940 ont été détruit lors des bombardements des Alliés pendant la Seconde guerre mondiale. Mais d’autres ont survécu.

« Par exemple, il reste beaucoup de photos de la Macédoine. En 1941, quand la Bulgarie reçoit la Macédoine en contrepartie de son alliance avec l’Allemagne, mon grand-père est envoyé là-bas pour quelques mois. J’ai trouvé toutes les pellicules de ce séjour et il faut dire qu’il y a beaucoup d’intéressés. Sur les réseaux sociaux énormément de gens ont commenté, m’ont écrit et ont partagé ces photos avec d’autres. Ces clichés ont beaucoup réjoui les Macédoniens, comme par exemple les photos de la ville de Kratovo que les gens ont pu connaître telle qu’elle était il y a 70 ans ».

A la rencontre du Bataillon des parachutistes en 1944

En 1945, lorsque la Bulgarie est déjà passée du côté des Alliés, Todor Slavtchev est envoyé come correspondant en Hongrie pour suivre les pas de l’armée bulgare. Le Fond d’or de la Radio nationale conserve une interview avec lui, dans laquelle il raconte comment il a transporté son laboratoire photo sur la ligne du front.

« C’était la Guerre patriotique. Les uns y participaient arme à la main, les autres comme les écrivains, les journalistes et les reporters avec des appareils photos et des caméras de cinéma. Le commandant du Premier bataillon de l’armée bulgare Chtério Atanassov et le général Ferdinand Kozovski ont ordonné l’installation d’un laboratoire photo dans le QG de l’armée. J’ai proposé d’installer mon laboratoire personnel de Sofia et je suis parti pour la Hongrie avec. A l’aéroport militaire de Szigetvár  en Hongrie, je me suis retrouvé avec le pilote de l’avion et un major de l’armée yougoslave. Nous devions prendre un avion deux places, c’est-à-dire qu’un l’un de nous devez s’assoir sur l’autre. Avec moi il y avait  tout le matériel pour le développement des photos, y compris les plaques, les papiers et le mimographe pour l’impression du journal du front ».

Dès le départ de l’aéroport de Sofia le photographe portant son laboratoire a déjà hâte de prendre des photos sur tout ce qui se passe autour de lui.

« On a réussi à trouver de la place pour le labo et le mimographe, alors après je ne tenais plus sur place, il y avait encore un peu de temps avant de décoller. L’œil du photographe n’arrête pas de chasser. Je voyais dehors arriver les sacs de lettres et colis pour les proches sur le front. Et sur mes photos on voit que même pendant cet instant je ne suis pas resté les bras croisés ».

Todor Slavtchev est aussi le reporter-photographe sur la vie quotidienne des gens et leurs petites histoires. Nous avons demandé à Yana ce qu’il a pu lui raconter de ces tranches de vie.

Grand-mère Eléna fait le café pour les voyageurs sur la route, 1940.

« Mon grand-père parlait peu de son travail. Mais il m’avait raconté l’histoire de cette photo avec une vieille femme assise sur une pierre qui, à la fin des années 30 restait toute la journée sur la route, entre le village d’Arbanassi et Tarnovo et préparait le café pour les voyageurs. C’est une petite histoire, mais particulièrement touchante, car aujourd’hui ces personnages n’existent plus ».

Tout aussi importante est l’archive sur les grands moments de l’histoire bulgare comme le 9 septembre 1944, le Jugement populaire des collaborateurs et bien d’autres. Parmi ces épisodes, il y a aussi les photos sur l’inauguration de la Radio nationale.

« Il y a une pellicule de juillet 1940 avec la première émission de la radio émise du mont Tcherni vrah à Vitocha, raconte Yana. On y voit les premiers journalistes, des comédiens, des personnalités célèbres. Je ne peux pas identifier toutes les personnes présentes mais je fais toujours mes recherches ». 

Première radiodiffusion de la RNB du mont Tcherni Vrah à Vitosha, 1940

C’est un gros travail que Yana Ouzounova fait tous les jours depuis plusieurs années et le trésor de Todor Slavtchev est inépuisable. Espérons, cependant, qu’elle obtiendra un jour le soutien si nécessaire des institutions publiques, supposées être concernées. 

Version française : Miladina Monova



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