Au VIIe siècle, les Protobulgares guidés par le khan Asparoukh traversent le Danube et établissent en 681 leur Etat sur les terres du Nord-Ouest de la Bulgarie, occupées par la plaine de la Dobroudja aujourd’hui. La première capitale du jeune Etat bulgare n’est autre que Pliska, qui par la suite est transférée à Preslav. C’est de cette époque que date l’apparition de figures de pierre étranges et insolites, ressemblant à des géants aux pouvoirs extraordinaires. On les dénommait balvan qui signifierait statue, idole, pilastre, dans le lexique du premier Etat bulgare, bref une incarnation de la puissance des héros de l’époque.
Les statues de pierre de cette époque se trouvent habituellement dans un décor de menhirs groupés, appelés devtaches pas nos anciens. Nous avons rencontré le maître de conférences Zarko Jdrakov de la faculté des Sciences de l’Art, auprès de l’Académie des Beaux-Arts, qui nous donne son avis sur les origines et la signification de ces pièces de notre patrimoine :
Les statues de pierre rappellent fortement celles de Bouddha au Tibet, connues encore comme les Bodhisattva. Elles sont associées aux symboles de la fertilité, avec leur ventre proéminent, leurs seins plantureux et leurs formes généreuses en général. Ces formes-là, on les retrouve aussi en Mongolie…
Deux des statues de pierre qui datent du IXe siècle, représentent un homme avec un heaume sur la tête et une femme, aux cheveux longs, qui tient entre ses bras croisés sur le devant une coupe à vin. Elles ont été déterrées lors des fouilles archéologiques près du village Tsarev brod, dans la région de Choumen :
Quant aux menhirs, groupés ou isolés, certains leurs attribuent des forces surnaturelles, et les considèrent comme l’incarnation des esprits des défunts. Ce n’est pas par hasard qu’on les retrouve à proximité des sanctuaires où reposent des dignitaires et autres seigneurs.
Les archéologues ont découvert de nombreux menhirs sur le territoire de la Bulgarie, principalement dans la région de Pliska et Madara, où se trouve un des châteaux-forts de l’ancienne capitale bulgare. Reste à savoir, si ces monuments imposants datent de l’époque des protobulgares où s’ils n’ont pas déjà existé lors de leur arrivée en terres bulgares…
Il est effectivement difficile de situer dans le temps ce patrimoine de pierre. Un de nos arguments est lié à la situation géographique, car les statues et les menhirs se trouvent tous à proximité de la capitale Pliska. Certains y voient une parenté avec la culture des tribus turques, sauf qu’il est peu probable que de telles stèles aient eu droit de cité dans l’Empire romain chrétien. Les Byzantins, non plus, ne les auraient pas gardées. Or, tous ces monuments ont traversé le temps sans changer de place, et même si historiens et archéologues font des références avec des époques différentes, à des tribus qui ont existé, comme celles des Coumans ou des Petchenègues, ils ne confirment pas moins le lien vivant entre passé et présent et racontent des histoires qui enrichissent notre existence…
Récit : Sonia Vasséva
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