Nous sommes à la veille de nouvelles législatives anticipées en Bulgarie, toujours sur fond de guerre qui fait rage en Europe, d’opinions opposées quant au soutien militaire accordé à l’Ukraine, de déclarations parfois extrêmes sur l’avenir géopolitique du pays, sans oublier l’inflation à laquelle les ménages ont toujours du mal à faire à face. Dans ce contexte, les sociologues font état d’une campagne électorale marquée par la lassitude qui n’a influencé l’opinion que de 4 % des électeurs et dans la majorité des cas, de manière négative. Les alertes à la bombe reçues dans plusieurs écoles depuis la semaine dernière auront également un effet dissuasif sur l’intention de vote. La peur favorise l’abstention électorale, a déclaré à la RNB Eléna Dariéva de l’Institut de sondage "Nassoka".

"Et tout cela arrive à un moment particulièrement intéressant : il y a une égalité au sommet. La différence de moins d’un pourcent entre les deux premières forces politiques signifie effectivement qu’il y a une égalité. Une bonne part des électeurs sont indécis même parmi ceux qui ont décidé d’aller voter. Notre expérience des élections précédentes de l’automne dernier nous a montré qu’un électeur sur dix décide pour qui voter le jour du scrutin ou le jour précédent."

La part de ces "électeurs impulsifs" s’élève à 7-14 %, précise Eléna Dariéva et cela peut avoir une influence directe sur les résultats.

"On est las et on en a assez de ces cinq campagnes électorales de législatives anticipées", conclut de son côté le sociologue de l’institut "Market Links" Dobromir Jivkov sur la RNB. D’après lui, on s’intéresse toujours moins aux sujets politiques et une apathie s’installe. Il anticipe même jusqu’à 10-15% d’électeurs qui se décideront au dernier moment, un mauvais signe :

"Presque la moitié de ces gens ont des revenus moyens ou élevés, ils vivent à Sofia, Plovdiv ou dans une autre grande ville. Ils observent la situation politique dans le pays et sont au courant des discours politiques, ce qui indique une bonne culture politique, c’est-à-dire qu’ils ne se fient pas aveuglémentaux uns ou aux autres."

La grande question ce 2 avril sera qui viendra en troisième position. Le parti "Renaissance" d’un côté est la force politique qui a dans la plus grande mesure vu son électorat augmenter. Le MDL d’autre part est le parti qui a eu les résultats les plus stables lors des derniers scrutins, explique Eléna Dariéva.

De son côté, Pétar Tcholakov de l’Institut de sociologie auprès de l’Académie bulgare des Sciences évoque la question épineuse de l’achat de votes en Bulgarie :

"L’achat de votes aura une influence sur les résultats, surtout s’ils sont serrés. Les bulletins de vote papier facilitent beaucoup plus la fraude électorale par rapport aux machines à voter".

"La guerre en Ukraine est une sorte de test qui a révélé qui est qui sur la scène politique bulgare. Ici, je suis d’accord avec le président Roumen Radev que tous les partis doivent énoncer de manière claire comment ils se positionnent par rapport à ce conflit, ce qu’ils ont d’ailleurs fait ce dernier mois."

Tout en soulignant l’importance de chaque scrutin, les deux analystes sont certains que ces élections ne seront pas les dernières. Les concurrents politiques sont à égalité, considère Pétar Tcholakov. Notre société est divisée ce qui est reflétée par la politique, ajoute Dobromir Jivkov. Alors que l’extrémisme des opinions serait contraire aux mentalités des Bulgares d’après le politologue Dimitar Ganev :

"De ce qu’on peut déduire de la situation actuelle, ces élections ne mettront pas un terme à la crise politique. Il faut attendre les élections municipales cet automne pour trouver une solution", déclare-t-il.

Alors que les politiques semblent déjà regarder vers l’avenir, vers la 50^ème legislature de l'Assemblée nationale en espérant y trouver un terrain propice à leurs idées, les Bulgares iront voter ce 2 avril avec l’espoir de briser le cercle vicieux de l’instabilité dès la 49^ème législature.

Edition : Vesséla Krastéva

Version française : Maria Stoéva