Il y a une continuité entre l’ancienne et la plus récente migration bulgare à travers le monde. Où qu’elles se trouvent dans le monde, les communautés bulgares sont consolidées autour des écoles et des associations qu’elles ont fondées elles-mêmes. C’est ce qu’a établi une étude d’envergure s’étendant sur 4 ans sur les diasporas bulgares de cinq continents : l’Australie, l’Afrique, l’Amérique du Sud et l’Amérique du Nord, réalisée par l’Institut d’ethnographie et de folkloristique doté d’un musée d’ethnographie auprès de l’Académie bulgare des Sciences (ABS).
C’est la première étude de ce genre sur les institutions, les liens, la vie spirituelle et le contact avec la Bulgarie des émigrés bulgares de 3ème ou 4ème génération. Financé par le Fond de la recherche du ministère de la Science, le projet "Héritage culturel et institutionnalisation des communautés d’immigrés historiques et contemporaines au-delà de l’Europe" juxtapose la migration d’aujourd’hui et celle d’il y a 100 ans. Un recueil de 17 articles est déjà accessible sur le site de l’institut.
En plus du recueil, les chercheurs ont également tourné un court documentaire sur le terrain auprès des communautés bulgares vivant hors de l’Europe. Le montage des dizaines d’heures de vidéos est l’œuvre de Lina Guergova et Yana Guergova qui voulaient présenter la perspective des migrants bulgares anciens ou contemporains, des expatriés qui se considèrent comme étant des Bulgares même issus de mariages mixtes et étant des immigrés de troisième ou quatrième génération.
"Notre première hypothèse est que les collectivités bulgares et l’héritage culturel subsistent grâce à l’activité des institutions mises en place par les Bulgares eux-mêmes : des associations, des écoles, des groupes de danse et de chant. C’est leur manière de garder leur identité bulgare et leur intérêt pour la Bulgarie", indique Lina Guergova à Radio Bulgarie :
"Dans une perspective historique, il y a beaucoup d’endroits, où il n’y a pas eu d’écoles bulgares pendant longtemps, comme en Argentine, au Canada, en Australie qui ont toujours attiré les expatriés bulgares. Après quelques générations, les Bulgares qui y habitent ne parlent plus leur langue, être Bulgare là-bas est un choix personnel.Beaucoup d’entre eux sont issus d’une série de mariages mixtes et ne sont donc que partiellement Bulgares mais ils font le choix de l’être et de participer à la vie de la communauté. Nous autres, les chercheurs, ne croyons pas qu’il y ait là un lien génétique qui les conditionne. Il faut cependant faire état des énormes efforts des activistes des communautés, les gens qui sacrifient leur temps libre pour aller à une répétition d’une troupe de danse ou pour organiser une fête dans une école qui parcourent parfois des dizaines de centaines de kilomètres afin de se retrouver avec d’autres Bulgares. Dans certains pays, comme l’Argentine ou le Brésil, être Bulgare rapporte du prestige. Dans d’autres, apprendre la langue bulgare facilite l’entrée dans une université. N’oublions pas ceux pour qui le bulgare est la seule façon de communiquer avec leurs grands-parents."
Ce documentaire reprend un autre projet des chercheurs ethnologues de l’ABS, qui avaient déjà réalisé une étude sur les communautés bulgares en Europe avant de se focaliser sur des territoires plus reculés. La conclusion qui s’impose dans les deux cas est que la migration a beaucoup changé au fil des années. De nos jours, on évoque en effet de plus en plus la mobilité comme une alternative à la migration, explique Lina Guergova. A ses dires, les différences entre les nouveaux expatriés et l’ancienne migration, c’est-à-dire les successeurs des émigrés des années 20 et 30 du XXe siècle, est la plus perceptible dans des pays comme le Canada et l’Australie.
"Il y a des territoires qui sont devenus moins attrayants, tels que l’Amérique du Sud, l’Afrique du Nord et l’Australie, ce qui s’explique par les processus économiques à l’échelle mondiale. En outre, on ne peut pas parler de migration au sens conventionnel dans les Emirats unis arabes par exemple – aller quelque part pour n’en plus revenir. On y constate en revanche une mobilité très prononcée. On observe d’ailleurs une continuité. Les nouveaux-arrivés trouvent des moyens pour entrer en contact avec les autres expatriés à travers les institutions qu’ils ont mis en place. N’oublions pas pourtant la contribution de nos ambassades qui sont toujours plus conscientes de leur rôle pour l’existence et le fonctionnement des communautés bulgares et leurs liens avec la Bulgarie".
Version française : Maria Stoéva
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